Pour ceux qui vivent sous une roche : WORDS jouent le Broughton Fest. Quand j'ai entendu ça, j'me suis mis à penser au band et à comment il s'est éclipsé de mon paysage musical. J'ai noté quelques questions, vite fait, un peu comme une ébauche d'entrevue. Je savais pas trop si j'allais en faire quoi que ce soit mais je l'ai quand même mentionné à PL, un soir que Pat a abordé le sujet, et il m'a relancé. Le résultat est digne de partage. Des éclaircissements honnêtes et généreux. Here it is.
La
révélation du lineup du prochain Broughton Fest contenait une surprise : la
réunion de WORDS. Est-ce qu'on peut appeler ça une réunion ? Mes souvenirs sont
un peu flous à ce sujet. Est-ce que le band s'était officiellement séparé?
On en a jamais vraiment parlé tu sais, on a juste
arrêté. On avait rien annoncé de façon officielle ou quoi que ce soit, ça n'en
valait juste pas la peine. Le soir où on est chacun parti de notre bord, on
pratiquait pour jouer à Gatineau le lendemain alors la seule personne à qui
j'en avais parlé c'était le booker de ce show-là. Je ne lui en ai même pas
parlé sur le coup en fait, j'ai juste dit qu'on ne serait pas là finalement
puis il m'avait répondu un paquet d'insultes comme de quoi on était pas correct
d'annuler à la dernière seconde comme ça. Sa colère était légitime alors je lui
ai répondu qu'on s'était séparé. C'était un peu moi qui s'occupait des communications
pour Words puis la vérité c'est que quand ça s'est passé, ça m'a brisé le cœur.
Je vivais un genre de deuil puis j'ai tout mis ça de côté. Juste de l'annoncer
m'aurait demandé trop d'énergie. Tout le monde s'est mis à se concentrer sur
autres choses et a vite mis ce projet-là derrière eux et je crois que c'était
la meilleure façon de faire. Pour ce qui est d'appeler ça une réunion, non, tu
peux pas. C'est pas une réunion. Comme je te dis, on a juste arrêté, puis on
n'a jamais eu la chance de bien terminer ce chapitre-là de nos vies. Je préfère
voir ça comme un dernier show qui n'a jamais eu lieu puis maintenant, 5 ans
plus tard, on a l'occasion de le faire et d'apporter un peu de fermeture à
toute cette histoire.
D'où est
venue l'idée de rejouer ensemble ?
Ce n'est pas la première fois qu'on nous offre de
faire un show post mortem. On n'a jamais vraiment considéré la chose avant maintenant
parce que je pense qu'on avait aucune raison de le faire. Je ne peux parler que
pour moi alors je dirai ceci : j'étais trop amer pour aborder l'idée avec
sérieux et intérêt dans le passé. C'était pas mon intention il y a cinq ans que
ça s'arrête même si aujourd'hui je suis pas mal convaincu que c'était de ma
faute. La première fois où on m'avait lancé l'idée, j'avais répondu qu'il faudrait
demander aux autres puis que ça ne serait pas moi qui le ferait.
Comment se
passent les jams ? Vous recréez la magie ?
Les gars sont tous d'excellents musiciens, ça a
toujours été le cas d'ailleurs. Vincent et William ont démarré Cold North tout
de suite après Words, et musicalement Cold North est l'évolution de Words, une
coche au-dessus. Jean-Philippe a démarré le projet qui est devenu Jet Black, un
groupe moins hard qui se trouve à être vraiment plus étoffé, nuancé, raffiné et
varié. Je pense que Jet Black lui a permis d'élargir son jeu puis je suis
obligé d'admettre que je pense que ça l'a rendu un drummer encore meilleur que
ce qu'il était dans le temps. Alors les gars se pointent et retombent dans du
matériel vraiment plus straight forward et simple. C'est un vrai jeu d'enfant
pour eux on dirait, et ils le font tellement bien que ça a même l'air trop
facile quand tu les regardes aller. Même Francis qui n'a pas joué de musique
depuis 5 ans est étonnamment dans la partie. Son playing n'est certainement pas
à la hauteur de son travail photographique mais c'est une autre paire de
manche. En ce qui me concerne, Words c'était mon exutoire. Words c'était ma
façon de ventiler ma colère, ma haine, ma rage puis tout ce qui avait besoin de
sortir. Je l'ai toujours fait de la façon la plus honnête possible mais
aujourd'hui, j'ai peut-être un peu moins d'intensité par rapport à certains
thèmes abordés. Je back encore toutes les paroles à 200 % mais je crois que le
moi dans le début de la trentaine a une autre approche ou une autre vision un
peu plus nuancée par rapport à certains des enjeux évoqués. Il faut dire que je
me sens assez désabusé depuis quelques années et que je combat la dépression.
Alors qu'il y a cinq je voulais changer ou sauver le monde, aujourd'hui j'ai
comme accepté la défaite puis mon seul réconfort c'est de voir l'humanité
récolter toute la crap qu'elle a semée.
C'est un one-shot deal ou envisagez-vous faire ça encore
quelques fois dans le futur ?
Je ne sais pas ce que l'avenir réserve mais il n'a
jamais été question de faire autre chose que juste ce Broughton Fest-ci. Tout
le monde a des vies occupées de plein d'affaires sauf Words alors je serais
très surpris que ça se reproduise. Vincent s'est marié cet été et continue
toujours d'aller plus loin sur le plan académique. William est maintenant
propriétaire d'une maison en banlieue où il prend plaisir à être un bon père de
famille. Jean-Philippe joue dans Jet Black, ils enregistrent d’ailleurs un nouvel
album de ce temps-ci alors gardez l'oreille ouverte pour ça sans compter qu'il
est amoureux par dessus le marché ! Francis a troqué tout son gear de basse
pour des appareils photos et des lentilles et jongle pratiquement avec deux
jobs à temps plein.
Il me
semble avoir entendu dire, entre les branches, qu'un des membres s'en va à
l'étranger, quelques temps. Est-ce que c'est un peu ce qui a mené à faire le
Broughton Fest ? Un show pendant que tout le monde est encore là ?
Je pense que oui. Vincent a récemment entamé des
démarches pour aller faire de la recherche dans une université prestigieuse des
États-Unis et si tout se déroule comme prévu, il devrait quitter le pays au
début de l'an prochain. Si on ne faisait pas ce show-là maintenant, on ne le
ferait probablement jamais. Je sais pas ce que tout le monde a en tête mais en
ce qui me concerne, je suis vraiment reconnaissant d'avoir la chance de jouer
avec ces 4 gars-là ensemble comme dans le temps une dernière fois avant que nos
vies ne mettent une grande distance géographique entre nous à nouveau.
Est-ce
que Pascal du Broughton Fest vous a contacté en premier ? Est-ce vous qui avez
entâmé les démarches ?
C'est Pascal qui nous l'a demandé. Puis étonnamment,
on a pas rejeté l'idée. Il faut croire que quand on veut quelque chose, il ne faut
pas lâcher. Si ce n'était pas de l'offre de Pascal, je ne crois pas que ce
show-là n'aille jamais lieu et dans ce sens, on lui doit une fière chandelle
parce qu'il nous donne une opportunité au bon moment. Il faut dire que Pascal
est un vrai de vrai, il nous a toujours supporté dans le temps, dès notre
premier show avec Stand As One. Puis après, on a fait plusieurs show avec The
Sleep. Ce gars-là est tellement intense que même après qu'on aille arrêté de
jouer ensemble, il n'a jamais cessé de nous supporter. Il ne s'en fait pas
beaucoup des gars comme lui, c'est moi qui vous le dit. J'espère que les gens
de son coin réalisent tout ce qu'il fait pour la scène de sa région.
Sans trop
en dévoiler, est-il possible de savoir à quoi s'attendre de votre set ? Et, de
l'autre côté, avez-vous des attentes quant à votre set ?
Vincent a composé une toute nouvelle chanson puis on
va commencer notre set avec. No joke. Ça parle de ma vie qui ne mène nulle part
puis j'essaye de chanter comme le chanter de Life Of Agony au début. Pour ce
qui est des attentes, je sais que Francis et moi on est juste content de
remonter sur scène avec nos amis. Les 3 autres gars jouent encore des shows
régulièrement alors je ne sais pas trop en quoi celui-ci est particulier pour
eux mais je pense que Words a été de quoi d'important et de significatif dans
chacune de nos vies et de pouvoir fermer le chapitre sur une meilleure note, de
se faire offrir l'opportunité d'effacer mon amertume, c'est vraiment quelque
chose que je veux savourer et apprécier le plus possible. C'est probablement la
dernière chance que je vais avoir de faire un show alors je veux juste avoir du
plaisir et en profiter. Pour moi, le fait de faire le show, ça va être la
confirmation que tous les cinq, on est encore des amis malgré les tumultes
passés alors ça risque définitivement d'être un moment riche en émotions pour
moi parce qu'en bout de ligne, j'aime ces gars-là en christ. Puis si je réussi
à ne pas trop avoir l'air d'un gros has-been comme Axel Rose tant mieux, je
touche du bois!
Est-ce
que t'as un examen à l'université le soir du show ?
Non,
j'ai dropé out alors je n'aurai pas d'excuse si jamais je suis en retard.